Il y a 90 ans, la révolution d’octobre 1934 dans les Asturies
Octobre 1934
Révolution d’octobre 1934, insurrection dans les Asturies.
À Madrid, le mot d’ordre lancé par les dirigeants socialistes est une grève générale pacifique, alors que la population ouvrière et paysanne est prête à l’insurrection totale et réclame des armes. Débordant les consignes de leurs dirigeants, les grévistes occupent des positions stratégiques dans la capitale. La garnison madrilène semble plus favorable aux insurgés qu’au gouvernement, ce qui aurait dû assurer la victoire populaire. Mais les représentants socialistes, qui ne souhaitent que le remplacement des ministres de la CEDA, vont faire marche arrière et provoquer l’échec du mouvement, faute de direction.
À Barcelone, Lluís Companys, président de la Généralité catalane, proclame « l’État catalan dans la République espagnole ». Mais, faute d’unité au sein des syndicats ouvriers et des partis populaires, là aussi, la révolte tourne court et la répression de l’État central fait quarante morts. Le gouvernement catalan est arrêté et son président condamné à mort (peine commuée en prison à perpétuité, dont il sortira gracié par le Frente Popular, en 1936).
Dans les Asturies, les mineurs sont à la pointe du soulèvement. La force du mouvement résidant dans le fait que les partis et les syndicats sont unis, l’UGT et la CNT forment l’UHP (Uníos, hermanos proletarios, Unissez-vous, frères prolétaires). La résistance et l’organisation du mouvement amènent l’édification d’une « commune » asturienne. Elle prend en main tous les aspects de la vie sociale, industrielle et politique. 50 000 mineurs, armés de dynamite, après avoir pris le contrôle du bassin minier, assiègent les casernes et les points névralgiques de la capitale régionale, Oviedo, ainsi que l’usine d’armement Trubia. Mais ils ne parviennent pas à prendre la caserne principale où sont stockées les munitions. Lorsque le gouvernement central envoie les généraux Goded et Franco mater la rébellion asturienne, désormais isolée, le comité provincial de l’alliance ouvrière annonce la liquidation du mouvement, le 11 octobre. Mais les insurgés décident de continuer la lutte face à la Légion du colonel Yagüe et les troupes marocaines. S’ensuit une répression atroce, qui ne s’arrête pas aux seuls insurgés mais touche toute la population (plus de 2 000 morts, 3 000 blessés et des milliers de prisonniers et de déportés). La police justifie cette sanglante opération en prétextant un armement important des mineurs (90 000 fusils, 33 000 pistolets, 330 000 cartouches, 10 000 caisses de dynamite et 30 000 grenades), alors que les fusils des insurgés n’avaient pratiquement pas de munitions.
Déroulement des évènements :
1er janvier 1934. Le gouvernement Lerroux revient sur la réforme agraire, sur l’enseignement religieux et sur les pensions des prêtres. Il amnistie les hommes politiques de droite sanctionnés par le gouvernement Azaña.
3 février 1934. Largo Caballero rassemble un comité révolutionaire. Il dit très fort que les ouvriers ne peuvent se contenter de défendre une démocratie bourgeoise et prône une révolution par la violence. Tandis qu’Indalecio Prieto, socialiste également, la combat avec vigueur, malgré la réserve prudente des dirigeants du PCE, tel José Diaz, secrétaire général.
31 mars 1934. Accords secrets entre Mussolini et les monarchistes espagnols pour l’envoi d’armes et d’argent aux nationalistes, en vue du renversement de la république. Le Duce promet une aide de 1 500 000 pesetas, 20 000 fusils, 200 mitrailleuses, 20 000 grenades[1].
Juin 1934. Grève générale dans tout le pays, réprimée par Salazar Alonso, membre du Parti radical, conseiller et président de la députation de Madrid, ferme partisan de l’ordre, nommé au ministère de l’Intérieur dans le gouvernement Lerroux. Des maires de village sont également arrêtés.
Été 1934. Marche des femmes espagnoles contre la faim.
4 octobre 1934. À Barcelone, Lluís Companys proclame « l’État catalan de la république espagnole ». Répression de l’État central : 40 morts, arrestation du gouvernement catalan et de son président, qui sera condamné à mort (la peine sera commuée ultérieurement en détention).
5 octobre 1934. Dans les Asturies, les mineurs sont à la pointe du soulèvement, les partis et les syndicats sont unis, l’UGT et la CNT forment l’UHP.
8 octobre 1934. Arrestations à Madrid et à Barcelone des dirigeants politiques et syndicaux de la rébellion.
10 octobre 1934. Franco et Goded sont appelés par le gouvernement pour mater la rébellion. Franco expédie la Légion du colonel Yagüe et les troupes marocaines. S’ensuit une répression meurtrière envers les populations.
12 octobre 1934. Le mouvement révolutionnaire est étouffé : plus de 2 000 tués, 3 000 blessés et 15 000 à 30 000 prisonniers ou déportés[2].
27 décembre 1934. Le prolétariat espagnol est un des plus puissamment organisés d’Europe avec celui d’Allemagne. Le journal espagnol ABC publie la répartition des adhérents des organisations ouvrières espagnoles. CNT : 1 577 000 adhérents, UGT : 1 444 000 adhérents, PSOE : 200 000 adhérents, PCE : 13 000 adhérents.[3]
ATTENTION: Pour ceux qui lisent le castillan nous vous invitons à vous rendre sur le site de LQSOMOS et de prendre connaissance de l’article dont sont extraite les photos :
Octubre de 1934: Revolución de Asturies
[1] La révolution et la Guerre d’Espagne, p. 317, Pierre Broué et Émile Témime, Éditions de Minuit, Paris, 1961.
[2] Ibid, p. 50.
Histoire de la Guerre civile d’Espagne, p. 26, Gabriel Jackson, Éditions Ruedo Ibérico, Paris, 1974.
[3] Archives du journal ABC.